Quels sont les symboles du Nouvel An lunaire ?

Par Pauline Le Gall
Photo de Saimen Lee

Pétards, enveloppes rouges, clémentines... Les symboles du Nouvel An lunaire sont multiples. On vous explique tout ! 

Les pétards
Dans la mythologie chinoise, le Nian est un monstre effrayant qui vit sous l’eau ou dans les montagnes, et qui sort de sa retraite au moment du Nouvel An lunaire pour effrayer les villageois et dévorer tous ceux qu’il croise. Plusieurs des traditions de cette fête sont liées à cette bête, qu’il faut à tout prix épouvanter.

Le Nian n’est pas infaillible, puisqu’il craint le rouge et le bruit. D’où l’utilisation des percussions et des pétards à ce moment de l’année. « Il faut remonter dans le temps pour comprendre cette tradition des pétards, nous explique Daniel, membre de l’ARFOI (Association des Résidents en France d’Origine Indochinoise). Dans le temps, en Chine, tout le monde habitait à la campagne. Quand les gens sortaient de chez eux, ils couraient le risque de rencontrer des loups, des animaux hostiles. La tradition a d’abord été de les faire fuir avec des percussions. Par la suite, quand la poudre a été inventée, les pétards ont été utilisés pour effrayer les démons et les mauvais esprits. »

Par le passé, le bruit du bambou qui crépite et explose en brûlant a aussi constitué l’un des moyens populaires pour effrayer les monstres, réels ou imaginaires. Une manière, sur le plan symbolique, de faire fuir tout ce qui a été négatif l’année passée et d’accueillir l’élan nouveau. Au moment du Nouvel An, le claquement des pétards retentit devant les maisons et les magasins. Ils sont aussi beaucoup utilisés pendant les défilés et ajoutent à l’ambiance festive de cette période de l’année.

Les clémentines
Les clémentines, tout comme les oranges, font partie intégrante des traditions du Nouvel An. Et pas seulement parce qu’il s’agit de l’un des fruits les plus populaires des mois de janvier et février. Les clémentines prennent une importance toute particulière à cette période à cause de leur nom.

« Le mot « clémentine » se prononce comme le mot « prospérité » ou « faste » en chinois » explique Véronique Lam. Le mot « orange » est quant à lui proche de celui désignant la richesse. » Dans la culture chinoise, il est fréquent qu’une orthographe ou une sonorité similaire permette de faire des rapprochements entre un objet et un concept. La symbolique autour de la clémentine ne s’arrête pas là. Les pépins du fruit ont aussi leur sens : ils évoquent la renaissance, la transmission. Le Jour de l’an en Asie, chacun se promène ainsi avec son sac rempli de clémentines, pour en offrir à ses connaissances : famille, amis, collègues...

« Ce sont des porte-bonheur » continue Véronique Lam. La couleur orange est aussi positive puisqu’assimilée à l’or, au bonheur et à la chance. D’autre part, les clémentines ne servent pas seulement de cadeaux pour les proches, elles sont également présentes dans les maisons et sont utilisées comme éléments de décoration. Il est ainsi fréquent d’en trouver disposées dans des bols ou sur de petits arbres.

Les enveloppes rouges
Tout comme les clémentines, les petites enveloppes rouges (hóngbāo) décorées de caractères dorés sont offertes (et très attendues) le jour du Nouvel An. On y glisse une somme d’argent, le plus souvent sous forme de quelques billets. Le montant varie selon la personne à qui elle est destinée.

« Cela vient d’une coutume très ancienne, explique Daniel. Avant, chacun recevait une enveloppe, c’était une forme de gratification pour le service rendu à la société. Tout le monde y avait droit, de l’empereur au petit paysan. On les donnait aussi pour faire fuir les mauvais esprits. C’était une manière de bien commencer l’année. » La coutume, qui remonte à la dynastie des Song (960 - 1279), veut que l’on remette cette petite enveloppe à tout son entourage : sa famille, ses amis, ses collègues...

« C’est un geste symbolique, souligne Véronique Lam. On la donne pour que l’année se passe bien et que notre entourage connaisse la prospérité. » Les enveloppes sont souvent offertes le jour J ou bien les jours suivants avec des clémentines. Si vous comptez donner un hóngbāo cette année, évitez simplement d’y glisser un montant qui implique le chiffre 4. La prononciation de ce dernier, en chinois, ressemblant à celle du mot « mort », ce montant est proscrit. Préférez-lui le chiffre 8, pour une année riche en succès !

La danse du lion
Si vous avez déjà assisté au défilé du Nouvel An lunaire, alors vous connaissez la danse du lion, qui s’effectue sous un costume à l’effigie de l’animal et nécessite deux danseurs. Les enfants l’apprennent autour de l’âge de 12 ans et elle est exécutée à chaque événement important, au rythme des percussions qui représentent les battements du cœur de l’animal.

« La danse du lion célèbre le renouvellement, nous explique Daniel. On peut la voir pour un mariage, un magasin qui ouvre... Elle symbolise quelque chose de nouveau. » La danse du lion est similaire à celle du dragon, associée dans l’ancien temps à l’empereur. « La tradition chinoise puise dans la nature », continue ce membre de l’ARFOI.

Les animaux sont ainsi liés à de nombreux symboles. Dans la croyance populaire, le lion, tout comme le dragon, porte chance pour la nouvelle année. Il représente le courage, la force et la sagesse. Traditionnellement, seuls les hommes pouvaient apprendre et pratiquer l’impressionnante danse du lion. Au fur et à mesure, les choses changent et garçons et filles peuvent désormais se mouvoir sous ce costume lors du grand défilé.

Les lanternes
Les lanternes fleurissent à l’intérieur et à l’extérieur des maisons à l’approche du Nouvel An lunaire. En règle générale, ces lumières rouges, de forme ovale et décorées avec des signes dorés, sont utilisées en Chine pour symboliser un événement important. Leur but premier était d’éclairer l’intérieur et l’extérieur de la maison.

Avec l’arrivée de l’électricité, les lanternes sont devenues majoritairement des objets de décoration qui revêtent une portée symbolique forte. Si l’on en voit en abondance aux abords d’une rue ou d’une habitation, on sait que l’on y célèbre un événement important. « Elles représentent le bonheur et surtout la vie » souligne Daniel de l’ARFOI. Est-il nécessaire qu’elles soient rouges ? Véronique Lam, qui tient le magasin Aux Merveilles d’Asie dans le 13e arrondissement parisien, l’affirme.

« Le rouge représente le sang, le bonheur, raconte-t-elle. Le blanc, à l’inverse, est signe de pureté et de mort. Les lanternes blanches sont rares, elles représentent le deuil. » Dans la croyance populaire, le rouge est aussi censé effrayer les mauvais esprits et est synonyme de chance. Il est donc tout indiqué de décorer son foyer de cette couleur pour célébrer la nouvelle année.

 

Article initialement publié dans le magazine Koï, numéro 3, janvier-février 2018


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